Mobilhub : A La Courneuve, un garage solidaire plutôt que le « Bel-air »
Par Elsa DUPRÉ
Le 23 juillet, 2020

Depuis 2018, La Courneuve dispose d’un garage solidaire, qui emploie des salariés en insertion, et offre des tarifs avantageux aux personnes en difficulté sociale. Une solution non-répressive pour mettre un frein à l’essor de la mécanique de rue, qui dépanne les habitants tout en leur infligeant de grandes nuisances.

« En 2011, La Courneuve était devenue un garage à ciel ouvert. Les habitants faisaient des pétitions contre les places de stationnements occupées par des épaves et l’huile de moteur qui salissait les rues. Après un état des lieux, nous avons dénombré une trentaine de points de réparation, comptant chacun trois ou quatre mécaniciens », se souvient Rachid Maïza, qui entame son troisième mandat de maire-adjoint au cadre de vie à La Courneuve.

Qui n’a jamais vu, en se promenant dans les rues à la périphérie de nos villes de banlieue, des groupes d’hommes autour de voitures, le nez dans le capot, allongés par terre, essayant de redonner vie à de vieilles guimbardes ? « Le Bel Air », c’est le nom poétique que les initiés donnent à ces garages officieux, bien moins chers que les garages traditionnels. Bien moins sûrs, aussi.

A l’époque, la mairie de La Courneuve met en place des « opérations grande lessive », alliant contrôles policiers pour verbaliser le travail dissimulé, le nettoyage de la voirie et des parkings. « La plupart des mécaniciens de rue étaient des personnes sans-papiers exploitées par un réseau mafieux. Nous sommes venus à bout de ce réseau. Il n’y a plus de points avec 15, 20 voitures en attente de réparation. Mais il reste des poches ça et là, et les mécaniciens de rue se sont surtout déplacés vers les communes limitrophes », concède Rachid Maïza.

UNE ALTERNATIVE À L’ILLÉGALITÉ

Il en est convaincu : la répression, seule, ne peut régler les problèmes inhérents au développement, depuis une quinzaine d’années dans les villes de banlieue, de la mécanique de rue. Et pour cause : si elle pose un problème en termes d’occupation de l’espace public, cette économie de la débrouille représente aussi une solution pour des habitants de plus en plus pauvres, qui ne peuvent se payer les services, de plus en plus chers, des garages classiques. Impossible, pour nombre d’entre eux, peu qualifiés, d’utiliser le vélo pour rejoindre leurs lieux de travail à l’autre bout de l’Ile-de-France ou en horaire décalés. « Il nous est arrivé, pendant des contrôles, de tomber sur des véhicules en réparation qui appartenaient aux mêmes personnes qui se plaignaient des nuisances », relève Rachid Maïza pour mettre en lumière les contradictions du problème.

Une solution émerge à partir de 2015, sous l’impulsion d’un jeune ingénieur alors élu, Seyffedine Cherraben, et de son acolyte, consultant en stratégie d’entreprise, Olivier Esclauze. « On a vu un reportage à la télé sur les garages solidaires, et on avait, dans notre entourage, des gens pour qui la question de la mobilité était un vrai frein au fait de trouver un travail. On a regardé en Ile-de-France, il n’y avait pas grand chose qui se faisait, alors que c’était déjà bien développé dans certains coins de France », narre Olivier Esclauze. En 2015, le duo mène une étude de faisabilité, puis s’entoure de jeunes de la Courneuve, devenus juristes, communicants, pour monter le projet. Ils baptisent leur association « Les Cités d’Or ».

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